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Le style sous-estimé de Michael Jordan

Comment His Airness a influencé le basketball et l’allure des athlètes professionnels qui l’ont suivi.

Par: MARC RICHARDSONDate: 2020-04-27

Michael Jordan est le meilleur joueur de basketball de tous les temps, un point c’est tout.

Bien que certains experts aient tenté de soulever une controverse, il n’y en a tout simplement pas. Pour vous en convaincre, le nouveau documentaire d’ESPN et Netflix The Last Dance abonde en arguments fournis par les joueurs de l’époque de Michael Jordan et par ceux qui ont suivi la voie qu’il a tracée. Il est incontestable qu’il a changé le destin des Bulls de Chicago et de la NBA, de même qu’il a révolutionné la façon de jouer au basket.

The Last Dance révèle aussi un aspect de Michael Jordan que plusieurs ne connaissent pas : non seulement il est bien vêtu, mais il s’habille ainsi en toute confiance et avec une parfaite aisance comme nous y aspirons tous. Ses plus récents choix vestimentaires – surtout durant la décennie suivant sa retraite – ont fait l’objet de moqueries et n’étaient dignes d’aucune louange. Cependant, si The Last Dance réaffirme la noblesse sportive de Michael Jordan, il montre aussi comment le style unique de His Airness est devenu un prolongement de sa façon d’être sur le terrain. En fait, Michael Jordan a influencé grandement la manière dont les basketteurs se vêtissent aujourd’hui.

Dans la NBA, il y a toujours eu des joueurs étoiles qui avaient du style. Prenons par exemple Walt « Clyde » Frazier qui était la vedette des Knicks de New York durant les années 1970. Il était reconnu pour avoir mené son équipe à deux championnats et pour son élégance éclectique hors du terrain, alors qu’il portait des vêtements habillés audacieux avec désinvolture. Il a aussi figuré parmi les premiers joueurs à avoir des chaussures à son nom. Sur la côte ouest, il y a eu Earvin « Magic » Johnson dont le style s’intégrait parfaitement au faste hollywoodien. Ces deux joueurs ont précédé Michael Jordan, tout comme beaucoup d’autres qui avaient un penchant pour l’extravagance.

« Lorsqu’il entrait dans le vestiaire, peu importe qu’il fût vêtu d’un complet ou d’un survêtement, il avait fière allure et il en était parfaitement conscient. C’était un mélange irrésistible d’assurance, de hâblerie et de charisme. »

Mais ce que Michael Jordan portait – et sa façon de le porter – se distinguait.

Il y avait quelque chose dans la prestance de Michael Jordan et dans la façon dont il portait ses vêtements qui lui donnait naturellement fière allure. Quand il fréquentait l’Université de Caroline du Nord, il se vêtait d’un chandail de rugby rentré dans son jean comme un collégien du début des années 1980 pour se promener dans Chapel Hill chaussé de flâneurs. S’il pleuvait, il s’abritait sous un parapluie de bon goût qui n’était peut-être pas signé Gucci, mais qui avait les mêmes teintes de crème, de vert et de rouge – un raffinement sans ostentation.

Lorsqu’il a fait le saut dans la NBA, Michael Jordan faisait encore montre d’une confiance discrète dans le choix de ses vêtements. Prenons par exemple le concours de panier smashé de 1985 où il affrontait certains des plus grands noms du basket : Clyde Drexler, Julius « Dr J » Erving, Dominique Wilkins et Larry Nance. Quand on regarde une photo des participants, il y a un je ne sais quoi permettant à Michael Jordan – qui n’était qu’une recrue ! – de se démarquer. C’est peut-être sa petite chaîne en or, ses chaussettes blanches un peu plus courtes que celles des autres ou son short qui est un peu plus long que celui de ses adversaires. C’est peut-être aussi tout bonnement l’ensemble de sa tenue et l’aisance qu’il projette – la confiance et l’attitude d’un meneur et d’un gagnant.

Ce style est devenu une évocation du savoir-faire de Michael Jordan.

Il va de soi que les vêtements de sport vont à merveille à un athlète et dans le cas de Michael Jordan, cela sautait aux yeux. Il avait aussi le don de choisir les bons couvre-chefs comme lorsqu’il a assorti un béret à un chandail à capuchon lors de la tournée des Bulls à Paris en 1997 et que cela avait l’air du tandem le plus naturel au monde.

Il aimait aussi les casquettes. Plus que partout ailleurs, c’était sur les terrains de golf où Michael Jordan adorait s’élancer que cela était le plus évident. Et il le faisait chaque fois avec élégance. Comme The Last Dance le révèle, Michael Jordan a joué une partie avec Danny Ainge entre deux matchs éliminatoires contre les Celtics de Boston, l’équipe de ce dernier. À part l’esprit compétitif, on aurait du mal à composer une meilleure tenue de golf : un superbe polo, sa chaîne en or d’un goût sûr bien en vue, un short qui lui va comme un gant et une casquette des plus classiques. Les clubs de golf peuvent réprimer la créativité vestimentaire, mais Michael Jordan n’avait pas froid aux yeux. Le lendemain il a marqué 63 points, un record en série éliminatoire.

À mesure qu’il a pris de l’envergure, son style s’est affiné. Au début, il portait un pantalon, des bretelles et une chemise noire à manches courtes, sans veston sport. Puis, il s’est tourné vers les complets, surtout ceux signés Armani. En fait, Michael Jordan a revêtu des complets tout au long des années 1990 qu’il se procurait chez un tailleur renommé de Chicago. Lors de ce même voyage en France en 1997, il a troqué son chandail à capuchon et son béret contre un complet et une cravate qui auraient plu à tous les Gordon Gekko de ce monde. Au milieu des année 1990, il était devenu le roi des chaussures de sport, mais il se pointait aux émissions télévisées de fin de soirée avec des flâneurs en suède aux pieds.

Deux décennies après avoir fait la page couverture de GQ, le magazine a décrit Michael Jordan comme le héros méconnu de l’ère des complets des années 1990. Et son faible pour les vêtements sur mesure Armani correspondait à la tendance du moment. Le style vestimentaire de Michael Jordan durant les années 1980 et 1990 ne visait pas à faire de l’épate ni à s’intégrer dans l’univers du basket. Il portait des complets tape-à-l’œil – et les plus provoquants lui seyaient à ravir – parce qu’il savait qu’il était le meilleur joueur de basketball du monde entier.

Lorsqu’il entrait dans le vestiaire, peu importe qu’il fût vêtu d’un complet ou d’un survêtement, il avait fière allure et il en était parfaitement conscient. C’était un mélange irrésistible d’assurance, de hâblerie et de charisme.

« Il était un meneur sur le terrain et il s’habillait comme un meneur à l’extérieur du terrain. »

Et c’est ainsi qu’il a influencé grandement la manière de se vêtir des basketteurs d’aujourd’hui. Les vedettes actuelles de la NBA s’intéressent beaucoup à la mode masculine. Qu’ils optent pour un complet Thom Browne ou un chandail Polo Ralph Lauren, ils sont fiers de leur apparence.

Le Michael Jordan que ces joueurs ont connu durant leur adolescence était probablement à cette époque le propriétaire d’une équipe de basketball qui portait un jean trop ample ou un complet trop mou. Ce n’est toutefois pas le Michael Jordan dont ils rêvaient de devenir. Tous les enfants qui jouent aux basketball aspirent à être comme lui, consciemment ou inconsciemment. Ils souhaitent posséder ses chaussures de sport, son chandail, ses petites chaînes en or, son franc-parler, sa confiance en soi et son air fanfaron.

Voilà comment Michael Jordan a changé le monde du basketball. Il était un meneur sur le terrain et il s’habillait comme un meneur à l’extérieur du terrain. Même s’il a commis quelques impairs, j’échangerais une ou deux tenues déplorables contre son esbroufe inimitable et sa parfaite aisance même vêtu d’un chandail à capuchon et d’un béret.

Marc Richardson est un rédacteur et photographe de mode basé à Montréal. On a pu lire ses articles et voir ses photos sur Fashionista, Grailed et dans le magazine Garage. Vous pouvez le suivre sur Twitter.